A l’heure où tout s’accélère, paradoxalement, nous n’avons jamais autant parlé de pause, de déconnexion, voire de Slow Business. Une grande curiosité sur le fait de travailler et de manager autrement et sur une telle antinomie entre les termes slow et business, m’ont amené à analyser de plus près cette tendance du Slow.
Alors, octroyez-vous quelques minutes pour lire cet article. Car détrompez-vous, le Slow Business n’est ni l’apanage des fainéants, ni un effet de mode. Déchargés de cette culpabilité, pourquoi ne pas essayer de décélérer, d’être plus créatif, d’inventer de nouveaux rythmes, d’être plus patient et plus endurant ? Et si finalement, vous acceptiez d’être lents à certaines périodes, pour être plus rapides le moment venu ? Car comme le montre Pierre Moniz-Barreto, dans son livre Slow Business, grâce à des modes de management orientés slow, des entreprises ont pu gagner en efficacité, en mieux être et en performance économique.
Adopter un nouveau rythme : le Tempo Giusto
La notion de Tempo Giusto est souvent citée comme référence. Transposée au domaine du business, elle dénonce le dogme de la vitesse comme condition de performance, et préfère la notion de juste temps.
Quelques principes pour diriger ses activités en chef d’orchestre selon Jacques Porte, pionnier de la musicothérapie en France :
- Nous devons sans cesse trouver une harmonie entre les rythmes à créer, les rythmes auxquels nous sommes soumis et notre propre rythme.
- Le rythme permet de distinguer des temps forts « temps existentiel » et des temps faibles « temps essentiel ». Le premier, d’ordre social et compétitif, relève d’une dictature de l’instant et va vite. Le second, réclame de la lenteur, et fait pénétrer dans une dimension temporelle plus vaste, plus profonde, plus consciente.
- L’intégration du principe de décélération permet d’améliorer la performance globale des individus et des collectifs.
- De la vitesse, toujours, mais des pauses, des intervalles, qui favorisent la concentration et une intériorité.
Repenser son rapport au temps
Le mouvement du Slow Business propose de repenser notre manière de travailler, et cela passe également par un autre rapport au temps.
Il n’implique pas forcément une apologie inconditionnelle de la lenteur, mais une meilleure maîtrise de son temps. Voir l’interview d’Yvon Chouinard, patron de Patagonia.
Quelques exemples pour illustrer ce meilleur rapport énergie-temps :
- L’exemple de Thierry Marx avec le judoka. Chef à la tête du Mandarin Oriental, Thierry Marx s’inspire au quotidien des valeurs du judoka dans son management (exigence mais aussi souplesse, patience, réflexion et humilité) et privilégie toujours le meilleur rapport énergie-temps (choisir une solution qui comporte un maximum d’efficacité pour un minimum d’effort). C’est le fameux « le mieux est l’ennemi du bien » !
Il pousse ses équipes à plus d’efficacité, n’hésitant pas à décrocher et à amener régulièrement ses collaborateurs à l’institut national du judo. Ce ne sont pas des moments perdus, mais des temps qui contribuent à souder les membres de ses équipes en s’inspirant de la philosophie des arts martiaux.
- Jason Fried, entrepreneur américain à la tête de 37signals, lutte contre les méfaits du temps toxique et prône la qualité du travail plus que la quantité. Ses conseils :
- Éviter les distractions, les coupures de rythme. Les interruptions sont toxiques.
- Eviter la réunionite.
- Acquérir un mode de travail plus sain comportant des occupations non professionnelles. S’aérer le cerveau, relativiser ses problèmes, stabiliser ses humeurs, améliorer les énergies. Ses collaborateurs développent ainsi une capacité à se ré-impliquer dans leur travail d’une façon renouvelée.
- Eviter l’excès d’urgence.
Le business à l’écoute de la nature : biomimétisme et chronobiologie.
Et si nous apprenions à diriger nos activités en nous inspirant des grands principes temporels issus de la nature ?
- Le biomimétisme : la nature comme modèle nous enseigne bien des choses. Resituer nos activités court-termistes dans une perspective plus longue ; sortir de notre zone de confort ; savoir être patient dans un contexte « speedé » et flexible dans un cadre rigide ; être ouvert aux influences extérieures ; accepter des cycles de transformations incessants, l’incertitude, etc.
- La chronobiologie : c’est le fameux « connais-toi toi-même » qui s’applique aux unités de temps de travail. L’idée est d’être le plus possible en accord avec ses rythmes naturels. Certains d’entre nous sont des « alouettes », soit des lève-tôt et des couche-tôt, alors que d’autres sont des « hiboux », soit des lève-tard et des couche-tard. Le Slow Business ne fait qu’encourager ce genre de distinction : un temps flexible, pas de contrôle des horaires, plus de confiance.
8 orientations pratiques de « Slow Business » :
- Favoriser le temps partiel, le temps souple, le temps nomade.
- Encourager le temps de la gestation dans les processus créatifs et décisionnels.
- Privilégier le temps de la vision : avantager les stratégies à long terme, inscrites dans un projet d’entreprise générateur d’horizon et de sens.
- Donner du temps à l’écoute.
- Gagner en capacité de discernement.
- Développer et mettre en pratique son intuition.
- Savoir dire non.
Le classement des entreprises où il fait bon vivre :
Classement de Great Place to Work.